Les mesures d'accompagnement que viennent d'annoncer les ministres Le Maire et Pannier-Runacher pour permettre à l'économie française de surmonter un brut ralentissement de l'activité dans de nombreux secteurs sont-elles des premiers soins d'urgence efficaces ?

En réalité, il s'agit, avant tout, d'un rappel des outils existants classiquement dans la gestion des entreprises en difficultés et qui sont bien connus de l'ensemble des professionnels du secteur qui les utilisent notamment dans les procédures de prévention (Mandat ad hoc ou Conciliation).

A ce titre, vient tout d'abord, le report du paiement des charges fiscales et sociales et ce, même s'il est précisé que cela se fera au cas par cas, secteur par secteur. Il n'est pas précisé si des cellules spéciales vont être mises en place, au niveau local, auprès de chaque Administrateur des finances mais on peut supposer que, à la vue de la masse des dossiers qui risquent d'affluer rapidement, une organisation adaptée devrait être mise en place.

Viennent ensuite les mesures concernant le financement des entreprises et surtout la gestion des défaillances dans le cadre du remboursement des crédits. Là encore, il s'agit d'une gestion, au cas par cas, secteur par secteur, mais il est préférable, dès que la relation avec le banquier n'est pas particulièrement proche et/ou les crédits sont importants et concernent plusieurs établissements, d'ouvrir en urgence une procédure de Mandat ad hoc ou de Conciliation pour se faire aider d'un professionnel qui va centraliser les demandes d'aménagement et servir de courroie de négociation avec les banques. Dans ces cas, il est en effet particulièrement déconseillé d'agir seul, même en situation d'urgence sanitaire comme celle que nous connaissons, car aligner différents établissement sur une position commune de report des échéances nécessite une certaine autorité et une pratique des banques que l'emprunteur n'a pas nécessairement.

Concernant l'intervention de la BPI, on ne peut, à ce stade, que demeurer réservés et il faut attendre les premiers exemples d'intervention pour voir quel est le périmètre exact de ce dispositif. Il faut toutefois que les banques jouent le jeu de ces prêts de trésorerie, attribués en urgence, car la BPI n'intervient que pour les garantir.

En ce qui concerne les fournisseurs, et si les difficultés de paiements s'accumulent du fait de la baisse de la trésorerie des entreprises les plus fragiles, le gouvernement recommande également une grande tolérance, notamment des grandes entreprises. Cette « discipline » qui ne peut s'écrire dans un texte de loi ou un décret ne vaut également que si les « grands donneurs d'ordre » respectent les délais de paiement et ne cherchent pas à tirer les délais et que les assureurs crédits font preuve de modération. Naturellement, là encore, si la situation devient problématique, et avant d'aboutir à l'ouverture d'une procédure collective, stade judiciaire des difficultés, il est recommandé de se faire aider et c'est précisément l'utilité d'un Mandat ad hoc ou d'une Conciliation de chercher à trouver des solutions avec les fournisseurs et créanciers.

Le gouvernement cite la médiation du crédit mais il ne semble pas cet organisme soit techniquement adapté et ait l'autorité nécessaire pour très rapidement agir et desserrer l'étau sur les entreprises qui souffrent.

On pourrait citer d'autres mesures comme le chômage partiel ou l'absence de pénalités pour les retards dans les marchés publics mais on peut, en résumé, indiquer que le gouvernement n'a pas de « baguette magique », à ce stade tout du moins, pour faire reculer les effets du coronavirus.

Il s'agit plutôt de rappeler que les procédure de prévention existent et que c'est un outil d'anticipation qui a fait ses preuves et qui permet, par le dialogue, de remédier aux difficultés par des reports, des rééchelonnements, des moratoires, des financements d'urgence notamment et ce avant qu'il ne soit trop tard et que l'on arrive à un état de cessation des paiements. Nous en sommes là et certains secteurs comme le tourisme, l'hôtellerie, l'évènementiel sont particulièrement touchés. D'autres comme le retail, déjà fragile, ou les industries qui s'approvisionnent en Asie vont très rapidement être touchées.

Il est cependant à craindre que ces outils non coercitifs deviennent assez vite inefficaces face à l'ampleur de la crise.

Il faudrait donc que le gouvernement réfléchisse à des mesures encore plus concrètes notamment à travers la mise en place un guichet unique pour le report des charges fiscales et sociales avec une simplification dans le montage des dossiers et un examen accéléré.

Pour les financements d'urgence, là encore, un effort significatif des banques serait tout particulièrement à envisager avec, là encore, des processus d'instruction des dossiers accélérés. L'état a, en l'espèce, une vraie valeur ajoutée pour convaincre les banques de se mettre au service de l'économie.

Ce ne sont que quelques pistes de réflexion pour éviter que la crise sanitaire qui, espérons-le, disparaitra rapidement, ne laisse des traces importantes au sein d'une économie qui peinait déjà à croitre.

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