Le 20 juin 2023, l'honorable Omar Alghabra, ministre des Transports a présenté à la Chambre des communes le projet de loi concernant la Loi édictant la Loi sur la responsabilité en matière de transport aérien et modifiant la Loi sur les transports au Canada et la Loi maritime du Canada1. Cette législation tant attendue fait suite aux tentatives infructueuses du Parlement en 2003 et 2006 de mettre à jour les cadres législatifs relatifs aux aéroports, aux administrations aéroportuaires et autres exploitants d'aéroports. Dans le contexte de la pandémie du COVID-19 et l'inquiétude du public à l'égard des retards dans les aéroports et les compagnies aériennes, des bagages perdus et des passagers pris au dépourvu, le ministre des Transports a indiqué que les modifications proposées par ce projet de loi visent à « aider à créer un secteur des transports plus efficace, plus transparent et plus responsable ». Cet article résume les aspects du projet de loi relatifs au transport aérien.

Adoption de la  Loi sur  la  responsabilité  des  transports aériens  La première partie du projet de loi promulguerait la Loi concernant la responsabilité dans le secteur du transport aérien  (la « Loi ») afin d'accroître la responsabilité et la transparence dans le secteur du transport aérien par l'entremise d'un certain nombre de mesures :

  1. Établir des exigences relatives à la fourniture de renseignements au ministre des Transports (le « ministre ») :  La Loi confère au ministre de larges pouvoirs pour demander des renseignements aux exploitants d'aéroports, aux transporteurs aériens et aux entités fournissant des services liés aux vols. Les demandes peuvent comprendre des renseignements concernant la capacité et le développement du système canadien de transport aérien, l'exploitation et le trafic aérien, des renseignements concernant la conformité d'un exploitant d'aéroport aux obligations internationales du Canada en matière d'aéronautique; et des renseignements qu'une administration aéroportuaire est tenue de conserver conformément au régime de sa loi constitutive. La Loi indique que ces renseignement, à certaines exceptions près, seront gardés confidentiels par le ministre et ne pourront être divulgués sans le consentement écrit de la partie qui les a fournis. Toutefois, nous ne voyons pas clairement comment les obligations du ministre à cet égard interagiront avec la législation sur l'accès à l'information. 
  2. Exiger des exploitants d'aéroports qu'ils prennent des mesures pour aider le Canada à s'acquitter de ses obligations internationales en matière d'aéronautique :  La Loi autorise le ministre à donner des directives écrites à un exploitant d'aéroport lui enjoignant de prendre toute mesure que le ministre juge nécessaire pour que le Canada respecte ses obligations internationales en matière d'aéronautique. À ce stade des procédures législatives, nous ne savons pas si cette référence générale aux obligations internationales sera interprétée comme incluant les obligations découlant de toute convention internationale à laquelle le Canada est partie par opposition aux seules obligations que le Canada a spécifiquement incorporées dans on droit interne par le biais d'une autre loi.
  3. Autoriser le gouverneur en conseil à prendre des règlements concernant l'élaboration et la mise en œuvre de normes de service relatives aux vols et aux services liés aux vols :  La Loi ne précise rien sur les conséquences possibles qui peuvent découler de ces normes de service, ce qui introduit une grande incertitude quant à l'impact que cette Loi aura en fin de compte sur les activités quotidiennes des exploitants d'aéroports et des fournisseurs de services. En outre, la Loi stipule que tout service fourni pour le compte d'un exploitant d'aéroport doit être conforme aux mêmes normes de service et qu'un exploitant d'aéroport sera tenu responsable de la conformité à ces normes par ses fournisseurs de services.
  4. Exiger des comités de gestion du bruit :  Les exploitants de certains aéroports2 à grand volume doivent établir et superviser un comité de gestion du bruit pour répondre aux questions et aux préoccupations du public concernant le bruit des aéronefs.
  5. Fournir un cadre de notification et de consultation en ce qui a trait au bruit des aéronefs :  La Loi prévoit un régime d'avis et de consultation publique pour les modifications d'une trajectoire de vol, y compris les modifications temporaires (moins d'un an) et permanentes (d'au moins un an) d'une trajectoire de vol comportant une trajectoire de vol en basse altitude3. Ce régime ne s'applique pas aux modifications aux trajectoire de vol qui sont causées par des intempéries ni par d'autres circonstances incontrôlables de courte durée. Les comités de gestion du bruit seront tenus de donner un avis public et, dans le cas d'une modification permanente d'une trajectoire de vol, de tenir une séance de consultation publique, avant de mettre en œuvre toute modification à cette trajectoire de vol. Les commentaires du public doivent être pris en considération par le promoteur d'une modification permanente d'une trajectoire de vol. La Loi prévoit également un processus de plaintes, qui pourrait ultimement faire en sorte que l'Office des transports du Canada (l'« Office ») ordonne à un promoteur de ne pas apporter des modifications permanentes à une trajectoire de vol. 
  6. Exiger des administrations aéroportuaires qu'elles élaborent des plans concernant les changements climatiques et la préparation aux changements climatiques :  La Loi confère au ministre de vastes pouvoirs pour édicter des règlements sur les changements climatiques. Par ce règlement, le ministre peut fixer des cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les aéroports et exiger des mesures d'adaptation aux changements climatiques. La Loi exige des administrations aéroportuaires qui exploitent certains aéroports4 de plus grande taille qu'elles accroissent leurs divulgations sur les changements climatiques en préparant un plan quinquennal sur les changements climatiques lequel énoncera une cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l'égard de l'exploitation de l'aéroport et une description des mesures prises pour atteindre cette cible. Ces administrations aéroportuaires devront également présenter un plan quinquennal sur les mesures d'adaptation aux changements climatiques lequel décrit les incidences actuelles et prévues des changements climatiques sur l'exploitation de l'aéroport et les mesures prises pour y remédier, ainsi qu'une description des opportunités commerciales actuelles et futures pour l'aéroport découlant des impacts des changements climatiques. Le contenu des deux plans devra être conforme aux normes internationales reconnues et demeure sujet à modification conformément aux règlements adoptés par le gouverneur en conseil. Par conséquent, la portée réelle de ces plans est encore incertaine. 
  7. Exiger des administrations aéroportuaires qu'elles publient de l'information sur la diversité parmi les administrateurs et la haute direction :  Les administrations aéroportuaires qui sont constituées en vertu d'une loi du Parlement doivent publier et transmettre au ministre un rapport annuel portant sur la diversité des membres de la haute direction.
  8. Droits et frais:  La Loi confère également à l'Office (après consultation auprès du ministre) le pouvoir de prendre des règlements concernant les frais qu'elle encourt dans l'exercice de ses pouvoirs en vertu de la Loi. La Loi n'indique pas qui assumera la responsabilité de payer de ces frais.
  9. Mise en place d'un mécanisme d'administration et d'exécution qui comporte un régime de sanctions administratives pécuniaires :  La Loi établit deux régimes pour les contraventions en vertu de la Loi : les infractions et les violations. Bien que les violations et les infractions entraînent des amendes pouvant aller jusqu'à 5 000 $ pour les particuliers et jusqu'à 250 000 $ pour les personnes morales, seules les violations peuvent être résolues par des ententes de conformité avec le ministre (lesquelles peuvent réduire tout ou en partie la peine applicable).

Partie 2 - Modification de la  Loi sur les transports au Canada  La partie 2 du projet de loi propose des modifications à la Loi sur les transports au Canada  dans le but d'accroître la transparence de l'information concernant l'accessibilité des voyages aériens pour les personnes handicapées. Plus significativement, les modifications autorisent le gouverneur en conseil à prendre des règlements : (i) exigeant que l'Agence des services frontaliers du Canada et diverses autres parties, y compris les transporteurs, les propriétaires et les exploitants d'entreprises de transport et certains fournisseurs de services, fournissent des renseignements au ministre ou à l'Office dans le but de soutenir l'accessibilité des transports (renseignements que le ministre et l'Office seront autorisés à rendre publics); et (ii) concernant le processus de traitement des plaintes relatives à l'accessibilité en ce qui concerne le transport des personnes ayant des déficiences. Les règlements devant être adoptés peuvent prévoir des personnes ou des catégories de personnes aux fins de l'application des règlements, prévoir des exigences supplémentaires qui leur sont applicables, imposer des exigences en matière de tenue de registres relativement au processus de traitement des plaintes, ainsi qu'exiger la présentation de rapports au ministre et à l'Office relativement au processus de traitement des plaintes.

Étapes suivantes

Le projet de loi C-52 va maintenant passer par les étapes restantes du processus législatif à la Chambre des communes et au Sénat. Comme le Parlement est actuellement en vacances d'été, aucune autre activité ne se produira avant cet automne. Étant donné que le projet de loi fait l'objet d'un nouveau débat dans les deux chambres du Parlement, il reste à voir si le texte sera modifié pour préciser davantage la portée de ces nouvelles dispositions. La loi dans son état actuel crée une grande incertitude à l'égard des exigences auxquelles devront faire face les exploitants du secteur du transport aérien, à la fois en raison de son libellé vague et, surtout, de la latitude considérable qu'ils ont laissée au ministre et au gouverneur en conseil pour adopter des règlements de grande portée.

Footnotes

1. Disponible en ligne : https://www.parl.ca/Content/Bills/441/Government/C-52/C-52_1/C-52_1.PDF

2. Les aéroports à volume élevé sont dont le nombre annuel de mouvements effectués selon les règles de vol aux instruments excède 60 000 mouvements chacune des trois années civiles consécutives précédentes. Ce seuil peut être modifié par règlement.

3. Les trajectoires de vol en basse altitude sont définies comme des trajectoires de vol inférieures à 2438 m (8 000 pi).

4. Les administrations aéroportuaires principales sont définies comme les administrations aéroportuaires qui répondent au seuil de 4 000 000 passagers au cours des trois années consécutives précédentes ou qui sont autrement déterminées par règlement.

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