Dans l'une des premières décisions en matière de cessation d'emploi parue depuis que la pandémie de la COVID-19 a ralenti l'économie et le système judiciaire, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a octroyé à un employé âgé de 58 ans ayant très brièvement occupé un poste de direction un court préavis de deux mois suite à son congédiement sans motif valable1. Il est encore tôt pour en tirer des conclusions, mais cette décision est un signe prometteur que les employeurs ne sont pas automatiquement tenus d'offrir de trop longues périodes de préavis à des employés ayant travaillé peu de temps dans leur organisation, ou parce que des employés dont l'emploi a pris fin peinent à trouver un emploi dans un marché peu favorable; il est néanmoins trop tôt pour connaître les effets réels que la pandémie aura sur les possible préavis.

Les faits

L'employé a été embauché en novembre 2018 pour une durée indéterminée à titre de vice-président, négociation d'actions. Il n'y avait aucune disposition en matière de congédiement dans son contrat d'emploi. L'employé a été congédié sans motif valable environ cinq mois plus tard et a obtenu trois semaines de salaire en guise d'indemnité de cessation d'emploi. Il était âgé de 58 ans lorsque son emploi a pris fin et son salaire était d'environ 100 000 $.

L'employé a poursuivi son ancien employeur et il a demandé au tribunal de lui accorder des dommages-intérêts équivalents à un préavis de douze mois. Il plaidait qu'il existe une présomption selon laquelle les cadres supérieurs ou les membres de la haute direction dont l'emploi prend fin sans motif valable reçoivent au moins douze mois de préavis, peu importe la durée de leur service.

Lorsque la décision est tombée, en juillet 2020, plus d'un an après les faits, l'employé n'avait toujours pas trouvé un autre emploi malgré des efforts raisonnables pour remédier à la situation.

La décision

Le tribunal a statué que le titre du poste de l'employé n'était pas en soi suffisant pour qu'il soit considéré comme un membre de la haute direction ou un cadre supérieur. En fait, en s'appuyant sur les responsabilités liées à son poste, le tribunal a conclu qu'il n'était ni l'un ni l'autre. Plus précisément, le tribunal a souligné que :

  • l'employé ne supervisait aucun des collègues de son département;
  • l'employé n'était pas responsable de la supervision ni de la direction stratégique de son département;
  • plusieurs employés avaient le même titre que lui; et
  • l'employé était à trois échelons sous l'équipe de direction de son employeur.

Puisque le tribunal a déterminé que l'employé n'était ni un membre de la haute direction ni un cadre supérieur, il devenait superflu de se pencher sur la question de savoir s'il existait une présomption qu'un préavis d'au moins douze mois serait offert aux membres de la haute direction et aux cadres supérieurs.

Le tribunal a octroyé des dommages-intérêts en remplacement de deux mois de préavis. Le juge a commenté que l'âge de l'employé était un facteur qui devait être pris en compte lors de la prise de décision en raison des possibilités d'emploi restreintes pour les employés plus âgés. Le fait que l'employé ait été incapable de se trouver un emploi au cours des quinze mois précédents et que l'Ontario compose encore avec les « réalités économiques de la COVID-19 » [traduction] n'a pas semblé être des facteurs déterminants pour le tribunal lorsqu'il a décidé de la durée de la période de préavis raisonnable.

Points à retenir

En common law, un employé qui est congédié sans motif valable a droit à un préavis raisonnable ou au versement d'une indemnité tenant lieu de préavis lorsqu'il n'y a aucune disposition limitant les droits de l'employé. Le caractère « raisonnable » est décidé au cas par cas selon plusieurs facteurs (notamment l'âge, l'ancienneté et la nature du travail de l'employé). La présente décision est un bon rappel que la nature véritable du poste d'un employé, plutôt que son titre, doit être vu comme un facteur déterminant – ceci permettra peut-être aussi de freiner la tendance actuelle d'octroyer des préavis démesurément longs pour des employés qui ont très peu d'ancienneté dans un poste.

Footnotes

1 George v. Laurentian Bank Securities Inc., 2020 ONSC 5415

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