Compte tenu du nombre élevé de réseaux de franchises, il est aujourd’hui relativement facile de se procurer des contrats de franchise déjà en usage. L’on peut aussi retrouver sur Internet divers modèles de contrats de franchise.

Dans ce contexte, plutôt que d’avoir à investir une partie de ses précieuses ressources (en temps et en argent) dans la conception et la rédaction d’une toute nouvelle convention de franchise, pourquoi ne pas partir d’un contrat qui existe déjà (et qui a possiblement fait ses preuves) ou, encore, d’un modèle, en l’adaptant tout simplement à son concept et en le modifiant pour y insérer ses coordonnées et les renseignements propres à son concept?

Notre expérience de plus de 45 ans en droit de la franchise démontre clairement qu’il y a plusieurs risques fort importants pour un franchiseur, et pour ses conseillers, à procéder de cette manière.

D’entrée de jeu, et bien qu’il ne s’agisse certes pas là du risque le plus grave, il y a parfois un risque de violation de droit d’auteur (puisque l’auteur du texte original d’un contrat peut en effet détenir un droit d’auteur sur celui-ci).

Les risques les plus sérieux se retrouvent cependant ailleurs, soit (a) dans ce qui est écrit dans le contrat servant de modèle, et, encore plus important, (b) dans ce qui n’y est pas écrit.

Au chapitre de ce qui est écrit dans le contrat servant de modèle, si celui-ci a été bien rédigé, ses clauses tiennent entre autres compte (a) du secteur d’activité du franchiseur pour lequel il a été rédigé, (b) des ressources humaines, financières, logistiques, technologiques et matérielles de ce franchiseur, (c) de la manière dont ce franchiseur est géré, (d) du modèle d’interaction que ce franchiseur veut avoir avec ses franchisés, (e) de la taille des franchises offertes, et (d) du degré de contrôle que ce franchiseur veut maintenir sur plusieurs aspects de chaque entreprise franchisée (par exemple, au niveau de l’emplacement, du financement, de l’approvisionnement, de la technologie, des ressources humaines, etc.).

Or, ce qui convient au franchiseur qui a fait rédigé ce contrat de base risque fort de ne pas convenir au franchiseur qui souhaite utiliser à son tour ce même contrat.

Ayant eu l’opportunité de lire à de multiples reprises (souvent dans un contexte de difficultés entre le franchiseur et l’un ou plusieurs de ses franchisés) des contrats de franchise rédigés à partir d’autres contrats ou de modèles, nous y avons souvent rencontré plusieurs incongruités, telles, par exemple, la référence à des menus et des recettes pour un franchiseur d’articles de sport, à des horaires de livraison pour un franchiseur en courtage immobilier et à des permis d’alcool pour un franchiseur œuvrant en entretien de pelouses.

Quoique tout à fait véridiques, ces exemples quelque peu loufoques sont, dans certains cas, sans conséquence sérieuse. Pour de nouveaux franchisés et pour leurs conseillers, ils montrent cependant un certain manque de sérieux, ou de professionnalisme, de la part du franchiseur.

Il y en a aussi plusieurs autres qui peuvent s’avérer beaucoup plus lourds de conséquences et de risques pour le franchiseur.

Lorsqu’un contrat décrit (et les contrats de franchise le font tous) les services offerts par le franchiseur à ses franchisés, le franchiseur doit non seulement rendre tous les services stipulés à son contrat, mais aussi les rendre de la manière et dans les délais prévus au contrat.

Aussi, lorsque le contrat stipule diverses formes de suivi et de contrôle de la part du franchiseur (entre autres, en matière de rapports et de renseignements financiers et opérationnels du franchisé), ces suivis et ces contrôles impliquent une certaine responsabilité pour le franchiseur de bien les faire conformément à son contrat et d’en faire un suivi adéquat.

De manière générale, plus un contrat confère de contrôle au franchiseur, plus grandes seront ses responsabilités, autant vis-à-vis le franchisé que vis-à-vis de tierces personnes (notamment les fournisseurs, les employés et les clients du franchisé) et vis-à-vis les autorités publiques.

Ainsi, un niveau de contrôle élevé du franchiseur sur les employés du franchisé pose le risque que, aux fins des lois applicables aux relations de travail, le franchiseur soit considéré comme étant le véritable employeur des employés du franchisé. De manière similaire, un niveau de contrôle élevé du franchiseur sur la publicité du franchisé soulève un risque que le franchiseur soit tenu responsable de violations de lois applicables à telle publicité (notamment en matière de protection du consommateur et de protection des renseignements personnels).

Cependant, là où l’utilisation par un franchiseur d’un contrat qui n’a pas été rédigé sur mesure pour lui et son concept pose la plus grande difficulté ne consiste pas dans ce qui y est écrit, mais dans ce qui ne l’y est pas.

Les clauses d’un contrat représentent le résultat de multiples choix faits, et de multiples décisions prises, par les dirigeants du franchiseur qui a fait rédiger le contrat avec le soutien et les conseils des experts juridiques qui l’ont rédigé pour lui.

À titre d’exemple, la grille de vérification de base que nous utilisons pour entreprendre, avec un franchiseur ou un franchiseur en devenir, la conception et la rédaction d’une nouvelle convention de franchise comporte 59 grands thèmes à l’égard desquels des choix doivent être faits parmi plus de 160 possibilités, dont plusieurs doivent aussi être adaptés à la situation du nouveau franchiseur en fonction de son secteur d’activité, de sa gestion, de ses ressources et de ses objectifs.

En conséquence, le contrat de franchise rédigé au terme de cet exercice reflète le résultat des choix faits et des décisions prises par le franchiseur aux fins de son réseau de franchises.

Sur les 160 choix possibles dont nous avons discuté avec un franchiseur tout au long du processus de conception et de rédaction de son contrat, seules les 59 (soit une par thème) choisies par ce franchiseur (sur la base de nos conseils) se retrouvent donc dans le contrat. Les 101 autres (qui pourraient être préférables pour un autre franchiseur) n’y apparaissent tout simplement pas.

Le franchiseur qui choisirait de rédiger, ou de faire rédiger, son contrat de franchise en se fondant sur le contrat écrit pour un autre franchiseur adopte donc intégralement des choix faits par un autre et se prive d’un nombre important d’options et de possibilités qui pourraient beaucoup mieux lui convenir.

L’objectif de tout nouveau franchiseur étant de faire signer son contrat de franchise par plusieurs franchisés, il lui sera fort difficile, voire impossible, de modifier les contrats déjà signés lorsqu’il en réalisera, quelque temps plus tard, les failles, les faiblesses, les déficiences et, surtout, les dispositions qui ne conviennent pas à son modèle de gestion, aux besoins de son réseau et à ses ressources.

Il risque donc alors de devoir adapter son entreprise à un contrat qui n’est pas fait pour lui plutôt que, comme cela devrait être le cas, de bénéficier d’un contrat adapté à son entreprise.

Voici trois conseils pratiques en matière de rédaction d’un contrat de franchise :

1. Confiez à des experts la rédaction de votre contrat de franchise.

Même si, à première vue, les contrats de franchise semblent semblables d’un franchiseur à un autre, il n’est est pas ainsi.

Pour un franchiseur, son contrat de franchise représente la pierre angulaire de tout son réseau.

Copieriez-vous intégralement les plans de la fondation de l’usine de votre voisin pour entreprendre la construction de votre gratte-ciel ?

Un expert juridique en franchisage n’est pas qu’un rédacteur de contrat; il est avant tout un conseiller indispensable qui pourra vous renseigner, vous assister et vous guider dans la conception et la rédaction d’un contrat de franchise clair et complet qui répond vraiment à vos besoins, à votre fonctionnement, à vos ressources et à vos objectifs, et non à ceux d’une autre entreprise, et qui protège bien vos droits et votre concept.

L’expérience démontre que l’investissement fait par un nouveau franchiseur dans la qualité de ses contrats est l’un des, sinon le, plus rentables à moyen et long terme.

2. Lisez attentivement et assurez-vous de bien comprendre votre contrat de franchise.

Même lorsque votre contrat de franchise a été rédigé par un expert en droit de la franchise, il est très important pour vous de bien le lire, de bien le comprendre et de vous assurer qu’il reflète bien votre concept et le mode de gestion et de fonctionnement que vous souhaitez pour votre réseau.

À cet égard, il est important de vous rappeler que, ce contrat ayant été rédigé pour vous, toute difficulté d’interprétation, toute incohérence et tout manque de clarté sera tranché par un juge ou un arbitre en faveur du franchisé.

3. Révisez périodiquement votre contrat de franchise.

Un contrat de franchise n’est pas un instrument statique.

Il doit être revu, mis à jour et modifié de temps à autre afin de tenir notamment compte de tout changement dans les lois, dans le fonctionnement de votre réseau, dans le marché, dans les technologies, dans vos services, etc.

Tout franchiseur sérieux devrait donc planifier une révision régulière de son contrat de franchise.

De manière générale, nous recommandons une révision tous les deux ans, ainsi qu’à l’occasion de tout changement important.

Cette révision devrait en premier lieu être faite par les dirigeants et gestionnaires du franchiseur puis complétée par son expert en droit de la franchise.

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