Le 27 octobre 2020, le Bureau du surintendant des institutions financières a publié son Projet de ligne directrice E-4, « Entités étrangères exploitant une succursale au Canada », qui était attendu depuis longtemps et dont la version définitive remplacera les lignes directrices désuètes E-4A (assurances) et E-4B (banques).La nouvelle ligne directrice était attendue en mars 2020, mais a été reportée en raison de la pandémie de COVID-19. La période de consultation sur le projet de ligne directrice a pris fin le 18 décembre 2020 et la version définitive de la ligne directrice est attendue au printemps 2021.

Le projet de ligne directrice, qui regroupe les règles applicables aux succursales de sociétés d’assurance et de banque dans un seul texte, est divisé en quatre rubriques :

  • Objet et portée
  • Direction de la succursale
  • Administration des affaires au Canada
  • Surveillance des succursales

Contexte

Le projet de ligne directrice est en voie d’élaboration depuis de nombreuses années, notamment au moyen de consultations du BSIF avec les succursales. Toutefois, les travaux ont été interrompus afin de permettre les révisions et la mise à jour, en 2017 et 2018, de la ligne directrice intitulée Gouvernance d’entreprise du BSIF, qui s’applique aux assureurs et aux banques constituées sous le régime d’une loi fédérale (mais pas à leurs succursales étrangères). Les mises à jour et les modifications de la ligne directrice intitulée Gouvernance d’entreprise ont pu alors inspirer l’élaboration du projet de ligne directrice.

Il a été généralement prévu que le projet de ligne directrice augmenterait les attentes en matière de gouvernance des succursales et de leurs établissements principaux, en partie pour remédier à la perception de certains milieux voulant que les succursales aient la vie beaucoup plus facile sur le plan de la gouvernance que les assureurs et les banques constitués sous le régime d’une loi fédérale.

Les succursales, en particulier les succursales de sociétés d’assurance, sont d’une taille et d’une complexité variées comprises entre les grandes sociétés en exploitation et les petites succursales souvent sous-exploitées ou presque inactives et sans employés à temps plein localement.

Objet et portée

L’objet du projet de ligne directrice est d’énoncer « les attentes du BSIF à l’égard des entités étrangères qui exploitent des succursales au Canada ». Comme la succursale constitue le prolongement de l’entité étrangère au Canada, plutôt qu’une entité juridique distincte, le rôle du BSIF consiste à surveiller les activités de l’entité étrangère au Canada, notamment sa conformité aux exigences de la Loi sur les sociétés d’assurances (la « LSA ») et de la Loi sur les banques (la « LB »), ainsi qu’aux directives du BSIF. Le BSIF ne réglemente pas la solvabilité de l’entité étrangère dans son ensemble.

Le projet de ligne directrice est très concis (un peu plus de trois pages) et utilement fondé sur des principes.

Direction de la succursale

Conformément aux attentes, le projet de ligne directrice définit les personnes qui sont chargées de réglementer la succursale étrangère plus largement que dans le cadre des lignes directrices existantes, qui sont axées sur la responsabilité d’une personne (l’agent principal d’une succursale de société d’assurance ou le dirigeant principal d’une succursale de banque), autorisée à déléguer son pouvoir au sein de l’établissement principal de l’entité ou ailleurs. Au contraire, le projet de ligne directrice attribue cette fonction à la « direction de la succursale », à savoir les « personnes qui ont le pouvoir et la responsabilité de superviser les activités au Canada pour l’entité étrangère ou pour son compte ». Ces personnes peuvent comprendre l’agent principal ou le dirigeant principal, ainsi que les cadres supérieurs de l’entité étrangère, quel que soit le lieu où ils se trouvent. Le BSIF s’attend à ce que la composition de la direction de la succursale soit proportionnelle à l’ampleur et à la complexité globales de la succursale.

Aux termes du projet de ligne directrice, les responsabilités de la direction de la succursale sont la mise en œuvre et la supervision :

  • des objectifs, stratégies et plans d’affaires propres aux activités au Canada;
  • de politiques de gestion des risques adaptées à l’ampleur, à la complexité et au profil de risque des opérations de la succursale;
  • de contrôles, pour gérer les risques liés aux activités au Canada;
  • de politiques et procédures de gestion des actifs et des passifs inscrits aux livres de la succursale et aux comptes connexes;
  • des évaluations indépendantes de la pertinence et de l’efficacité des contrôles, politiques et procédures susmentionnés. (L’évaluation interne peut être effectuée par des tiers qualifiés ou par des particuliers ou des groupes internes au sein de la succursale ou de l’établissement principal.)

La surveillance opérée par la direction de la succursale devrait se fonder sur des « rapports suffisamment complets et fréquents » et sur une bonne compréhension des cadres juridiques et réglementaires qui s’appliquent à la succursale canadienne.

Administration des affaires au Canada

Ententes avec l’établissement principal

Comme le prévoient les lignes directrices actuelles, le BSIF s’attend à ce que les fonctions importantes exécutées par l’établissement principal de l’entité étrangère (directement ou par le biais d’ententes d’impartition) soient documentées par la direction de la succursale dans des ententes écrites sur les niveaux de service, qui devront être conformes aux attentes et aux pratiques exemplaires dont il est question dans la ligne directrice B-10 du BSIF sur l’impartition. Comme auparavant dans le cas des accords intervenus entre la succursale et son établissement principal, ces fonctions seront probablement consignées dans des politiques ou des déclarations écrites au lieu de l’être dans une « entente » au sens strict, puisque la succursale fait partie de la même entité juridique que l’établissement principal et ne peut en conséquence pas conclure de contrat avec elle-même.

En particulier, le projet de ligne directrice prévoit désormais que tout accord prévoyant un flux de fonds entre la succursale et l’établissement principal doit être clairement documenté et fourni au BSIF. En outre, le BSIF doit être avisé 30 jours à l’avance de tout transfert de fonds proposé qui déroge sensiblement au processus documenté.

Tenue de documents

Le BSIF s’attend à ce que les documents commerciaux de la succursale soient mis à jour et exacts à la fin de chaque jour ouvrable et à ce qu’ils soient suffisamment détaillés pour permettre :

  • au BSIF d’examiner et d’analyser les activités et affaires de la succursale;
  • au BSIF de gérer les actifs de la succursale avant la nomination d’un liquidateur si le surintendant prend le contrôle des actifs de la succursale au Canada;
  • au liquidateur de procéder à une liquidation efficace des actifs de la succursale au Canada.

Contrairement aux lignes directrices actuelles, le projet de ligne directrice ne prévoit pas expressément une longue liste de types de dossiers qui, selon toute attente, devraient être conservés par la succursale ou signés par l’agent principal/ dirigeant principal ou son délégué officiellement désigné, comme, dans le cas des succursales de sociétés d’assurance, les conventions de réassurance, les contrats de groupe et les conventions de courtage.

Registres électroniques

Comme à l’heure actuelle, aux termes du projet de ligne directrice, le BSIF acceptera les documents électroniques qui sont « accessibles et intelligibles sans engager de coûts supplémentaires et en utilisant des applications commerciales facilement accessibles » dans la plupart des cas. Également, pour certains types de renseignements comme les accords de réassurance ou les dossiers sur des activités plus complexes, les registres électroniques pourraient être insuffisants et le BSIF pourrait exiger la conservation du document imprimé original à la succursale.

Comme à l’heure actuelle, les copies des dossiers électroniques doivent être conservées dans un serveur situé à l’agence principale de la société étrangère au Canada (aux termes de la LSA) ou au bureau principal ou à tout autre endroit au Canada désigné par le dirigeant principal (aux termes de la LB). Aux termes du nouvel Accord Canada–États-Unis-Mexique (« ACEUM »), les succursales des entités constituées en vertu des lois des États-Unis ou du Mexique seront dispensées de l’obligation de tenue de documents au Canada prescrite par la LB et la LSA, pourvu que le BSIF ait un « accès immédiat, direct, complet et continu » aux documents conservés à l’extérieur du Canada. Ces dispositions prendront effet au plus tard le 1er juillet 2021, premier anniversaire de l’ACEUM.

Surveillance des succursales

Même si elles sont principalement réglementées par les organismes de réglementation de leur pays d’attache, les entités étrangères sont responsables devant le BSIF et doivent veiller à ce que leurs activités sous réglementation fédérale au Canada soient conformes à la LSA ou à la LB (selon le cas), aux directives du BSIF et aux autres obligations fédérales applicables.

Évaluations prudentielles

Le BSIF s’attend à ce que la direction de la succursale :

  • élabore et supervise une réponse appropriée à ses attentes en matière de surveillance;
  • réponde à toutes ses communications et demandes de renseignements de manière exhaustive et en temps opportun;
  • demeure informée des résultats de ses travaux de surveillance;
  • l’avise rapidement des questions ou évolutions de fond qui ont une incidence sur la direction ou les activités de la succursale canadienne.

Composition et aptitudes des membres de la direction de la succursale

Le BSIF s’attend à ce que l’entité étrangère lui fournisse de l’information à propos des aptitudes des membres de la direction de la succursale. Le BSIF s’attend à ce que l’entité étrangère l’avise régulièrement en temps voulu de :

  • tout changement réel ou potentiel dans la composition des membres de la direction de la succursale;
  • toute circonstance pouvant nuire à l’aptitude d’un membre de la direction de la succursale.

Donner suite à la non-conformité

Le BSIF s’attend à ce que toutes les entités étrangères qui exploitent une succursale au Canada se conforment en tout temps à la LB ou à la LSA, selon le cas, au projet de ligne directrice (une fois qu’il sera en vigueur) et à ses autres directives applicables.

Lorsque le BSIF est d’avis que les exigences et les attentes ne sont pas respectées, il peut appliquer « d’autres mesures de surveillance et de réglementation » à l’égard de la succursale canadienne de l’entité étrangère, conformément au projet de ligne directrice.

À venir

Comme il est mentionné dans la lettre du BSIF qui annonce le projet de ligne directrice, la période de consultation prend fin le 18 décembre 2020 et la version définitive de la ligne directrice E-4 devrait suivre au printemps 2021. Le processus de sollicitation des commentaires est expliqué en détail dans la lettre. Le BSIF, qui entend suivre la méthode qu’il a adoptée pour la version définitive de sa ligne directrice intitulée Gouvernance d’entreprise, a l’intention d’apporter des révisions consécutives aux consignes sur la gestion du risque et les fonds propres afin de supprimer les renvois y étant faits à l’« agent principal » et au « dirigeant principal ».

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