Le 3 décembre 2020, le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie a tenu une séance d'information sur le Bureau de la concurrence du Canada. Le commissaire de la concurrence, Matthew Boswell, ainsi que le sous-commissaire de la Direction générale de la promotion de la concurrence, Anthony Durocher, et la sous-commissaire déléguée de la Direction de la politique, de la planification et de la promotion, Leila Wright, ont assisté à la séance d'information en tant que témoins.

La séance d'information a inclus des discussions sur une série de sujets, notamment la pandémie de COVID-19, la confidentialité des données, l'économie numérique, la collaboration avec les homologues du Bureau dans le monde et les modifications éventuelles de la Loi sur la concurrence (la « Loi »). Les principales conclusions de la séance d'information sont les suivantes : 

  • L'économie numérique demeure le principal centre d'intérêt du Bureau, qui continue à accorder la priorité à l'application de la législation sur les marchés numériques et sur les marchés axés sur les données. Le Bureau se heurte à des défis d'administration de la Loi en lien avec l'économie numérique en raison de la grande quantité de données sur ces marchés.
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  • Le Bureau de la concurrence et, selon lui, les sociétés qui font des affaires au Canada tireront parti de la convergence des lois sur la concurrence canadiennes et des lois sur la concurrence d'autres pays, particulièrement celles des États-Unis.
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  • Le Bureau considère que le nouveau projet de loi C-11 sur la confidentialité des données comporte des aspects favorables à la concurrence, notamment la notion de mobilité des données, l'échelonnement des sanctions financières et l'amélioration du partage de renseignements entre le commissaire à la protection de la vie privée et le commissaire de la concurrence au fédéral.
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  • Le Bureau continue de consacrer des ressources à la surveillance des pratiques commerciales trompeuses en lien avec la pandémie de COVID-19.

Séance d'information sur le Bureau de la concurrence du Canada

La séance d'information a commencé par l'allocution d'ouverture de M. Boswell, au cours de laquelle il souligné l'importance de l'application de la législation sur la concurrence en temps de crise. Le Bureau a travaillé avec le gouvernement à tous les niveaux afin de mettre en évidence l'importance de la concurrence dans la reprise économique du Canada après la pandémie de COVID-19. En outre, M. Boswell a souligné que la concurrence dans l'économie numérique demeure une priorité importante pour le Bureau.

Le reste de la séance s'est déroulée sous forme de questions-réponses avec les trois témoins.

L'économie numérique et les « grandes entreprises technologiques »

Au cours de la séance d'information, un certain nombre de membres du comité se sont enquis de l'approche du Bureau concernant la concurrence dans l'économie numérique. M. Boswell a souligné que l'explosion des données au cours des dernières années a rendu l'application de la législation sur la concurrence plus complexe que jamais auparavant et, en outre, que les organismes de protection de la concurrence partout dans le monde ont dû composer avec la gestion d'intervenants en position dominante dans l'économie numérique. Selon M. Boswell, l'accès aux données a une incidence sur la capacité d'une société à s'adapter au marché et, finalement, à contrôler le marché. Par conséquent, le Bureau demeure axé sur les questions de concurrence liées au contrôle des données, notamment la manière dont le contrôle pourrait créer des barrières à l'entrée de nouveaux intervenants sur le marché.

M. Boswell a également brièvement discuté des difficultés auxquelles le Bureau se heurte relativement à l'administration et à l'application de la Loi dans l'économie numérique, particulièrement en lien avec les « grandes entreprises technologiques ». Il a souligné que, même si le Bureau s'engage à faire tout ce qui est en son pouvoir avec les ressources dont il dispose, ces ressources sont limitées. La complexité plus élevée des enquêtes dans l'économie numérique nécessite des ressources accrues. M. Boswell a observé que des organisations externes, comme l'Institut C.D. Howe et la Global Competition Review, ont appelé le Canada à augmenter les ressources du Bureau afin qu'il puisse faire face à cette complexité.

Les homologues internationaux et la convergence des lois

La séance d'information a également intégré des discussions sur la façon dont le Bureau travaille avec ses homologues d'autres pays. M. Boswell a insisté sur le rôle crucial que joue la coopération internationale dans l'application de la législation sur la concurrence, particulièrement dans l'économie numérique où les sociétés ne sont pas limitées par des frontières physiques. Le Bureau a établi de nombreux cadres de coopération avec des partenaires du monde entier, y compris, dernièrement, le Cadre multilatéral de coopération et d'assistance mutuelle des autorités de la concurrence avec ses partenaires du Groupe des cinq (les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni).

Le comité s'est également demandé si la convergence entre les lois sur la concurrence canadiennes et celles des partenaires du Canada était nécessaire. M. Boswell a reconnu que l'orientation récente du Bureau – qui précise que les accords entre acheteurs (notamment les accords de fixation des salaires et les accords de non-débauchage) ne feront pas l'objet d'enquêtes criminelles en en vertu de la Loi – désynchronise la législation sur la concurrence canadienne en regard de la législation comparable des États-Unis. À cet égard, M. Boswell a déclaré que la convergence des lois sur la concurrence en Amérique du Nord serait très utile à de nombreux égards, particulièrement pour le milieu des affaires qui pourrait tirer parti du fait d'avoir une série de lois semblables à suivre dans les deux pays.

M. Boswell a également discuté de l'avantage d'avoir des codes de conduite dans les secteurs où il pourrait y avoir un déséquilibre du pouvoir de négociation. Par exemple, à la suite d'une étude de marché effectuée par la Competition and Markets Authority du Royaume-Uni, le Groceries Supply Code of Practice a été promulgué, accompagné de précisions sur la façon dont les détaillants alimentaires devraient gérer leurs relations avec les fournisseurs afin de demeurer conformes au Code. Même si le Bureau est en mesure de réaliser des études de marché, il n'a pas le même pouvoir que son homologue du Royaume-Uni d'exiger la production de renseignements et de formuler des recommandations au gouvernement fondées sur ses conclusions dans le cadre de telles études. Selon M. Boswell, lorsque ces codes de conduite sont mis en Suvre, ils sont généralement bien reçus et semblent être utiles à la gestion du déséquilibre du pouvoir de négociation allégué.

Les modifications de la Loi

Les membres du comité se sont demandé si les modifications apportées à la Loi permettraient au Bureau de mieux s'acquitter de son mandat.  M. Boswell a déclaré qu'il est toujours utile de vérifier si la législation est conforme à son objet et qu'il vaut la peine d'envisager un examen exhaustif de la Loi. Ce commentaire a été fait dans un contexte d'imposition de sanctions pour non-conformité à la Loi, relativement auxquelles M. Boswell a jugé que des sanctions financières modulables en fonction de la taille de la société, comme celles proposées dans le projet de loi C-11, favoriseront probablement une plus grande conformité.

En ce qui concerne les modifications apportées à la Loi, M. Boswell a également observé qu'en mai 2019, le ministre de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique (ISDE) a demandé au Bureau d'examiner tous les aspects de la législation sur la concurrence canadienne afin de s'assurer de sa conformité à son objet. Le Bureau poursuit son examen sous la direction d'ISDE.

Le projet de loi C-11

Le Bureau a également formulé des commentaires sur le projet de loi C-11 devant le comité, la législation sur la confidentialité des données étant actuellement examinée par le Parlement. Le Bureau accueille favorablement l'extension de la portée des capacités de communication de renseignements entre le Commissariat à la protection de la vie privée et le Bureau aux termes du projet de loi. Le Bureau observe que ces capacités étendues constitueront une évolution importante pour les deux organismes vers la progression de leurs enquêtes respectives. En outre, M. Boswell a observé que le projet de loi comprend des aspects favorables à la concurrence, notamment la mobilité des données, qui accordera aux consommateurs un droit à la portabilité des données applicable au transfert de renseignements entre les fournisseurs de services. Par conséquent, la concurrence s'intensifiera et l'innovation sera favorisée sur les marchés, tandis que les consommateurs contrôleront davantage leurs données personnelles. Bien que le Bureau semble favorable au projet de loi, M. Boswell a observé que celui-ci n'avait pas entrepris d'examen exhaustif de la législation et qu'il ne lui avait pas été demandé de formuler des commentaires au moment de la rédaction.

La pandémie de COVID-19

Le travail accompli par le Bureau en réponse à la pandémie de COVID-19 a également été examiné au cours de la séance d'information. Au début de la pandémie, le Bureau a pris la décision sans précédent de publier une orientation destinée au marché à propos de sa volonté d'exercer un pouvoir discrétionnaire d'application de la loi sur les collaborations entre concurrents en lien avec le maintien des chaînes d'approvisionnement de biens et services essentiels. Le Bureau a également formé une équipe chargée de surveiller les pratiques commerciales et les indications trompeuses sur le marché, relativement auxquelles les plaintes ont doublé entre avril et juin 2020. Au début de la pandémie, le Bureau a délivré des lettres d'avertissement à des douzaines de sociétés à propos d'indications fausses ou trompeuses données en lien avec des produits supposés prévenir, traiter ou soigner la COVID-19. Le Bureau travaille en étroite collaboration avec Santé Canada en vue de répondre aux préoccupations concernant les publicités liées à la pandémie.

Conclusion

La séance d'information du comité a permis de souligner que le Bureau demeure axé sur les nouveaux enjeux liés à la concurrence dans l'économie numérique. Elle a également permis de donner des indications sur les sujets de préoccupation des parlementaires en lien avec la Loi et, plus généralement, la concurrence. Ces préoccupations portaient largement sur l'abus de position dominante et sur la position dominante d'entreprises de divers secteurs et, enfin, sur les outils que la Loi procure afin de lutter contre la puissance commerciale.

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