La Commission européenne a publié une Etude sur l'évaluation du Règlement (UE) 2019/1150 dit « Règlement P2B » désormais applicable depuis le 12 juillet 2020.

Cette étude avait pour objectif d'étudier l'effectivité de la règlementation deux ans après son entrée en vigueur.

Les constats réalisés aux termes de cette étude sont peu optimistes. La Commission européenne souligne une mise en Suvre inégale et insuffisante des exigences tirées du Règlement P2B par les opérateurs de plateforme.

Selon cette dernière, le faible niveau de sensibilisation au respect de la règlementation et le manque d'application effective ont été identifiés comme les principales causes du constat de la Commission européenne.

L'analyse de cette étude est pour vous l'occasion de faire le point : Etes-vous à jour du Règlement P2B ?

Précisons qu'en France, le non-respect des obligations posées par le règlement P2B est considéré comme une pratique restrictive de concurrence, pouvant donner lieu à une amende susceptible d'aller jusqu'à 5 millions d'euros ou 5% du chiffre d'affaires HT réalisé en France.

A qui s'applique le Règlement Platform to Business (P2B) ?

Le Règlement P2B s'applique aux services d'intermédiation en ligne (notamment aux marketplaces et plateformes numériques) et aux moteurs de recherche fournis à des entreprises utilisatrices (des professionnels) qui, au travers de ces services d'intermédiation en ligne, proposent des biens ou services à une clientèle de consommateurs situés dans l'Union Européenne.

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En revanche, échappent à l'application du règlement :

  • Les services de paiement en ligne ;
  • Les outils publicitaires en ligne ;
  • Les échanges publicitaires en ligne ; et
  • Les opérateurs de plateformes BtoB

Quelles sont les principales exigences de transparence issues du P2B ?

Les opérateurs de services intermédiaires sont tenus de délivrer un certain nombre d'informations aux professionnels afin de leur apporter de la transparence sur les conditions applicables sur leur plateforme.

Ces informations doivent être fournies dans les conditions générales conclues entre l'opérateur et le professionnel (article 3 du P2B). A ce titre, il est imposé à l'opérateur de :

  • Rédiger des conditions générales claires et compréhensibles ;
  • Décrire le service qu'il propose et les éventuels services accessoires ;
  • Notifier le professionnel référencé sur un support durable en cas de changement de ces conditions générales, dans le respect d'un délai de préavis égal ou supérieur à 15 jours.

L'opérateur est également tenu de fournir des informations précises sur les éléments suivants :

La suspension, résiliation ou restriction du compte du professionnel (article 4 du P2B)

  • En cas de suspension ou restriction : L'opérateur est tenu de transmettre l'exposé des motifs de sa décision sur un support durable avant que la restriction ou la suspension ne prenne effet ou au moment où elle prend effet ;
  • En cas de résiliation : L'opérateur doit transmettre l'exposé des motifs de sa décision sur un support durable au moins 30 jours avant que la résiliation ne prenne effet.

Les conditions de référencement (article 5 du P2B) 

A ce titre, l'opérateur est tenu de :

  • Divulguer les principaux critères de classement des biens et services référencés sur la plateforme ;
  • Décrire les possibilités d'influer sur le classement moyennant le versement d'une rémunération par le professionnel référencé ;
  • Assurer un niveau de transparence suffisant sur les éventuels traitements différenciés mis en Suvre.

Les biens et services accessoires (article 6 du P2B)

L'opérateur est tenu de :

  • Inclure dans ses conditions générales une description du type de biens et services accessoires proposé ;
  • Préciser, le cas échéant, dans quelles conditions le professionnel est autorisé à proposer ses propres biens et services accessoires à ses clients consommateurs par l'intermédiaire de l'opérateur de service intermédiaire.

Les traitements différenciés (article 7 du P2B)

Dans le même sens, l'opérateur est tenu de :

  • Inclure dans ses conditions générales une description de tout traitement différencié en relation avec des biens ou services proposés aux consommateurs par l'opérateur ou par le professionnel ;
  • Préciser les principales considérations économiques, commerciales ou juridiques à l'origine du traitement différencié.

Ces exigences de transparence sont-elles respectées par les plateformes ?

L'examen des pratiques mises en Suvre par les opérateurs de services d'intermédiation en ligne ont révélé que de nombreuses plateformes ne disposent pas de CGU spécifiques aux utilisateurs professionnels ou que celles-ci ne sont rendues accessibles qu'après enregistrement du professionnel sur la plateforme, ce qui est contraire aux exigences du P2B.

La Commission européenne fait un constat plus positif du côté des exigences tenant à la communication des motifs de restriction, suspension ou résiliation des comptes des utilisateurs professionnels. Elle met en avant la conformité générale de grandes plateformes telles que « Booking.com » qui détiennent les plus grandes parts de marché. La Commission constate que la proportion de plateformes qui se conforment à l'obligation de fournir ces informations est à peu près la même pour les grandes, moyennes et petites plateformes, et ne varie pas de manière significative entre les secteurs et les écosystèmes industriels.

S'agissant des exigences de transparence attendues au niveau du classement, la Commission constate que 96 opérateurs sur les 290 dont les pratiques ont été examinées (soit 33,1%) ont intégré les paramètres de classement dans leurs CGU. Elle relève que les petites plateformes sont les moins bonnes élèves et notamment les plateformes de covoiturage, les petites boutiques en ligne, les plateformes de livraison et de services domestiques.

S'agissant des informations sur les services accessoires, le rapport révèle que seules 44 (15,2 %) des 290 opérateurs examinés dans le cadre de cette étude ont fourni de manière transparente des informations sur leurs propres services accessoires. Dans le même temps, les informations sur les biens/services auxiliaires que les utilisateurs professionnels sont autorisés à fournir sont encore moins nombreuses : 27 plateformes seulement (soit 9,3%).

A ce sujet, la Commission note une hétérogénéité dans les descriptions des biens et services accessoires qui sont données par les opérateurs. A titre d'exemple, sont considérés comme des services accessoires : les services d'assurance automobile ; les options de paiement et de livraison.

Enfin, sur la transparence en matière de traitement différencié, le rapport révèle que de nombreuses grandes plateformes ont été accusées d'avoir adopté un comportement d'auto-préférence ou ont été condamnées pour ce motif (Amazon, Apple) et qu'en l'état, aucune disposition relative au traitement différencié n'apparait dans leurs conditions générales.

Si au regard de ces constats, la Commission européenne souligne une amélioration générale perceptible dans les pratiques des grandes plateformes, le respect des dispositions du P2B reste nettement à améliorer notamment avec l'entrée en application du Règlement Digital Markets Act (DMA) qui vient renforcer ces exigences de transparence.

Les moyennes et petites plateformes sont celles qui ont une plus grande marge de progression.

Afin de gérer au mieux les risques découlant du non-respect de la réglementation applicable, n'hésitez pas à faire auditer vos conditions générales afin d'identifier les éventuels écarts avec la réglementation applicable.

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