Jusqu'ici, Maurice s'est plié au diktat de la communauté internationale et a adopté une série de réformes fiscales et structurelles pour donner plus de substance à son secteur du global business. Faut-il systématiquement se faire remarquer comme le bon élève ?

Maurice a besoin des investissements internationaux et doit donc coopérer, comme il le fait, avec les institutions internationales telles l'OCDE, l'Union européenne et les administrations fiscales de ses partenaires traditionnels. Ces organisations reconnaissent volontiers les efforts de Maurice pour réformer sa fiscalité pour tourner le dos aux pratiques des paradis fiscaux.

Pour autant, Maurice doit veiller à communiquer plus en amont et au plus haut niveau de ces institutions internationales, en menant un lobbying approprié destiné à souligner efficacement l'ensemble des raisons techniques qui démontrent qu'il est loyal dans la compétition internationale.

Il ne faut pas oublier que les États les plus actifs au niveau de ces institutions internationales sont, pour certains, des partenaires majeurs de Maurice, mais généralement endettés et exposés à l'évaporation fiscale du fait de l'internationalisation de leurs acteurs économiques. Les investissements de leurs entreprises à Maurice sont autant d'investissements en moins chez eux. Une confiance éveillée s'impose donc pour s'assurer que leurs attentes restent légitimes et également loyales pour permettre à Maurice de conserver une fiscalité attractive pour pouvoir développer son secteur des services.

Qu'en est-il de la souveraineté du pays sur les questions touchant notamment à la fiscalité ?

Officiellement, le pays où se réalisent les investissements internationaux (dit le pays d'investissement) est pleinement souverain pour fixer les taux des impôts qu'il décide de lever. Mais comme le pays d'origine des entreprises qui investissent (soit le pays dit investisseur) est également libre de structurer sa législation fiscale, il ne se prive généralement pas pour prévoir des mécanismes dits «anti-abus» ou encore «antiévasion » pour imposer ses entreprises lorsqu'elles s'exposent à ces mécanismes. Il est donc fondamental que ces entreprises soient correctement accompagnées par des experts de la fiscalité internationale qui maîtrisent, à la fois, les règles de l'État investisseur et celles de l'État d'investissement, en plus des dispositions de l'éventuelle convention fiscale internationale applicables pour structurer les investissements en question pour qu'ils ne soient pas exposés aux fameuses CFC rules (Controlled foreign corporation).

En d'autres mots, comme l'État d'investissement n'a pas intérêt à ce que les entreprises de l'État investisseur soient pénalisées fiscalement dans leur État d'origine, sa souveraineté fiscale est donc relative. En effet, pour être efficaces, ses lois fiscales doivent tenir compte de celles en vigueur dans l'État investisseur, notamment pour permettre aux conseils fiscaux des entreprises de structurer leurs investissements de façon à éviter que les entreprises concernées ne se retrouvent imposées dans leur État d'origine sur le résultat réalisé dans l'État d'investissement.

Pouvez-vous nous donner un exemple concret ?

Prenons le cas de la France. L'article 209 B du Code général des impôts prévoit, à certaines conditions, l'imposition en France du résultat de la filiale étrangère lorsque celle-ci bénéficie à l'étranger d'un taux d'imposition inférieur à la moitié du taux qui aurait été applicable à son résultat si elle était localisée en France. Il convient de noter que l'imposition des sociétés du global business à 15 % (au lieu de 3 % précédemment) permettra de faire échec efficacement à ce dispositif français étant donné la baisse progressive et programmée du taux de l'impôt sur les sociétés françaises jusqu'au taux de 25 % qui sera effectif à partir de 2022.

En effet, puisque la filiale mauricienne ne paiera pas un impôt sur les sociétés inférieur à 50 % au taux de l'impôt sur les sociétés françaises, elle n'exposera donc pas sa société mère française à une imposition en France sur son résultat mauricien.

Nous basculons dans une nouvelle ère dans nos relations commerciales avec l'Inde avec la fin de la période transitoire pour être éligible à la réduction de 50 % sur les plusvalues. Le secteur du global business est-il suffisamment armé pour tenir le choc ?

Il doit se renforcer techniquement pour être plus compétitif, que ce soit sur le marché indien ou les autres, en Afrique et ailleurs. Tant qu'il ne fera pas cet effort, il laissera filer de nombreuses opportunités de services à ses concurrents.

Published in Global Business Magazine April 2019

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