Le 5 mars 2019, la Cour d’appel a accueilli la demande pour permission d’appeler des pharmacies appelantes dans l’affaire Pharmacie Tania Kanou (Jean Coutu) c. Côtéet a ainsi permis l’appel du jugement du 30 octobre 2018 de la Cour supérieure autorisant l’exercice d’une action collective à leur encontre.

Dans cette cause, M. Bernard Côté  reproche essentiellement aux appelantes, des pharmaciens propriétaires œuvrant sous diverses bannières, de s’adonner à certaines pratiques de surfacturation et de ne pas divulguer leurs honoraires de façon détaillée aux patients québécois. Selon le demandeur, les prétendues pratiques de surfacturation seraient principalement liées au fait que les appelantes facturent aux patients bénéficiant d’une assurance médicament privée des frais ou des honoraires professionnels disproportionnés, déraisonnables et inéquitables par rapport à ceux facturés aux patients couverts par le régime public d’assurance médicaments.

Malgré que l’appel d’un jugement statuant sur une demande d’autorisation soit rarement permis en raison du fait que le test établi par la Cour d’appel  dans l’arrêt Centrale des syndicats du Québec c. Allen1 (« l’arrêt Allen ») est très exigeant, l’honorable Marie-Josée Hogue, j.c.a.. a été convaincue par les arguments des appelantes selon lesquelles que le jugement de première instance comportait une faiblesse apparente concernant l’interprétation des conditions d’exercice de l’action collective.

Reprenant les moyens d’appel présentés, la Juge Hogue note que la juge de première instance a reconnu que la preuve, au stade de l’autorisation, ne démontrait pas que le demandeur avait lui-même payé ses médicaments plus chers que les patients assujettis au régime public. Néanmoins, la juge de première instance a tout de même autorisé le recours sur la base d’une preuve statistique qui tendait à démontrer qu'en moyenne, un patient bénéficiant d’une assurance privée paierait prétendument des montants plus élevés pour ses médicaments. Or, tel que le plaident les appelantes, « ne disposant d’aucun recours personnel contre l’une ou l’autre des requérantes, vu notamment l’absence de faute à son égard et une absence de préjudice, la juge ne pouvait conclure à l’existence d’une cause défendable au sens de l’article 575(2) C.p.c. ni que l’intimé peut être un représentant adéquat2. »

La Juge Hogue retient également comme sérieux le second argument présenté par les pharmacies requérantes, voulant que l’action collective proposée par l’intimé constitue une attaque contre le régime législatif en vigueur au Québec, qui permet expressément aux pharmaciens québécois de facturer des frais différents aux patients couverts par un régime privé.

Ainsi, reconnaissant que le jugement a quo était affecté d’une faiblesse apparente, la Juge Hogue reconnait que le test sévère de l’arrêt Allen est rencontré et autorise la requête pour permission d’appeler. L’arrêt que la Cour d’appel rendra au fond apportera donc des précisions d’intérêt quant au critère voulant que la personne demandant l’autorisation d’exercer une action collective doive disposer d’un recours personnel prima facie valable. Il s’agit indéniablement d’un dossier à suivre avec attention au cours des prochains mois.

Footnote

1      2016 QCCA 1878.

2      Arrêt, par. 8.

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.