L'épidémie mondiale de coronavirus a un impact sur de nombreuses entreprises canadiennes. La pandémie et les mesures de confinement ont provoqué des interruptions de la chaîne d'approvisionnement, des perturbations des effectifs et une modification de la demande, entre autres difficultés. Par conséquent, de nombreuses entreprises examinent leurs droits et obligations aux termes de leurs contrats commerciaux au cas où une des parties aux contrats est incapable de poursuivre ses activités normales. Il pourrait s'avérer possible dans les circonstances d'invoquer une exception d'inexécution prévue par une clause de force majeure ou les règles de droit générales.

Clauses de force majeure

Le point de départ est le contrat. La plupart des contrats commerciaux renferment une clause de « force majeure », qui définit ce qui constitue un cas de force majeure, stipule les conséquences d'un cas de force majeure pour les parties et définit la procédure qu'une partie doit suivre si elle souhaite soulever cette clause.

Les clauses de force majeure sont généralement interprétées de manière stricte par les tribunaux. De manière générale, un cas de force majeure est un événement imprévisible et indépendant de la volonté d'une partie qui crée un problème d'exécution réel et important. Le libellé d'une clause de force majeure doit être soigneusement examiné, en particulier pour savoir s'il inclut ou peut vraisemblablement inclure une pandémie ou une épidémie.

Si l'une des parties ou les deux concluent qu'un cas de force majeure s'est produit, l'étape suivante consiste à déterminer les incidences contractuelles de ce cas. Le contrat prévoit-il qu'un cas de force majeure suspend la totalité ou une partie des obligations des parties ou qu'il déclenche un droit de résiliation? Le libellé de la clause doit également être examiné pour déterminer la portée de l'obligation des parties d'atténuer les effets de la force majeure. Il peut toutefois y avoir obligation de déployer des efforts raisonnables pour atténuer ces effets même sans libellé exprès à cet effet.

Enfin, la partie qui cherche à soulever un cas de force majeure doit également examiner la procédure à suivre pour ce faire, qui est prévue au contrat. Le contrat commercial prévoit habituellement un avis formel et peut exiger un certain degré de collaboration entre les parties.

Et si le contrat est muet?

Il n'y a pas de doctrine distincte de la force majeure en common law (c'est pourquoi la force majeure doit être abordée dans les contrats). Toutefois, la défense de « force majeure » a été édictée dans le Code civil du Québec (le « C.c.Q. ») et, dans la mesure où la loi du Québec s'applique, une partie peut toujours soulever la force majeure, même si celle-ci n'est pas prévue au contrat.

En vertu de l'article 1470 du C.c.Q., une partie ne peut être tenue responsable du préjudice causé à autrui si elle prouve que le préjudice résulte d'une force majeure, à moins qu'elle ne se soit expressément engagée au contrat à le réparer. En règle générale, un cas constitue une force majeure dans les circonstances suivantes :

  • il était imprévisible au moment de la signature du contrat;
  • il était totalement indépendant de la volonté de la partie qui l'invoque;
  • il a rendu impossible l'exécution par la partie de l'obligation contractuelle concernée.

Inexécutabilité et impossibilité

Si le contrat n'est pas régi par les lois du Québec, la doctrine de common law de l'inexécutabilité (frustration), qui libère les parties de la poursuite de l'exécution d'un contrat, offre une autre option. De façon générale [traduction] « il y a inexécutabilité lorsque la loi reconnaît que l'obligation contractuelle est devenue impossible à exécuter indépendamment du défaut de l'une des parties, car les circonstances de l'exécution rendent les obligations radicalement différentes de celles qui avaient été prévues par contrat » (Davis Contractors Ltdv.Fareham Urban District Council, [1956] AC 696 (HL), p. 160). La Cour suprême du Canada a repris la définition de Davis Contractors et en a fait le critère établi au Canada (Naylor Group Inc.c.Ellis-Don Construction Ltd, 2001 CSC 58, par. 53-56).

Conformément à cette définition, le Canada a étendu la portée de la notion d'inexécutabilité aux événements qui empêchent la réalisation des intentions ou objectifs des parties, mais aussi aux événements qui rendent l'exécution des obligations contractuelles impossible, sans égard aux objectifs des parties. Dans certains territoires, en particulier aux États-Unis, ce dernier cas est régi par la doctrine distincte de l'« impossibilité ».

En règle générale, la doctrine de l'inexécutabilité fait l'objet d'une interprétation stricte au Canada, si bien qu'il peut être difficile d'établir l'inexécutabilité d'un contrat. La doctrine de l'inexécutabilité s'applique parfois à la relation de travail, mais elle peut être éclipsée par les lois du travail et leurs règlements dans certains territoires.

À l'avenir : nouveaux contrats

Pour les contrats conclus après le début de la pandémie, il peut être difficile de faire valoir la survenance d'un cas de force majeure, parce que la pandémie est maintenant un événement connu. Dans ce contexte, les parties pourraient désormais souhaiter élaborer avec soin un libellé ou un mécanisme concernant la répartition spécifique du risque lié à la COVID-19.

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