Le 26 janvier, Santé Canada a publié un avis précisant comment l'état « dormant » d'un médicament dans la base de données sur les produits pharmaceutiques peut déterminer s'il doit être utilisé comme produit de référence canadien (« PRC ») aux fins d'une présentation abrégée de drogue nouvelle (« PADN »). L'avis confirme que l'état dormant peut constituer une preuve qu'un médicament n'est plus commercialisé au Canada. Comme nous le verrons plus loin, il se peut que les fabricants de médicaments génériques souhaitant entrer sur le marché canadien puissent s'appuyer sur d'autres PRC dans leurs PADN et même contourner le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). L'avis pourrait également se traduire par la perte des protections en matière de données accordées à une dorogue innovante qui n'est pas commercialisée au Canada.

Contexte

La démarche de la PADN est utilisée par les fabricants de médicaments génériques pour obtenir une autorisation de mise en marché d'un produit fondée sur le fait que le médicament générique présente les mêmes caractéristiques pharmaceutiques et, le cas échéant, de biodisponibilité que le PRC. Mais qu'est-ce qu'un PRC approprié?

Par défaut, un médicament commercialisé au Canada en vertu d'un avis de conformité doit être utilisé comme PRC aux termes de l'article C.08.001.1a) du Règlement sur les aliments et drogues (« RAD »). Toutefois, si un tel médicament n'est plus commercialisé au Canada, un autre médicament peut être utilisé, à condition : i) qu'il soit jugé acceptable pour Santé Canada; et ii) qu'il puisse être utilisé pour établir la bioéquivalence avec un médicament qui était auparavant commercialisé au Canada (art. C.08.001.1(b)). 

Dans ce contexte, l'avis confirme que l'état dormant dans la base de données sur les produits pharmaceutiques peut constituer une preuve qu'un médicament n'est plus commercialisé au Canada. Santé Canada attribue cet état à un médicament si le fabricant présente un avis indiquant que le médicament n'a pas été vendu sur le marché canadien pendant douze mois consécutifs. 

Contourner le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité)?

L'avis de Santé Canada peut également avoir une incidence sur l'application du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). Ce règlement prévoit la création d'une liste de brevets relatifs à un médicament et vise à assurer que les médicaments subséquents ne contreviennent pas aux brevets inscrits. En vertu de l'article 5 de ce règlement, les fabricants de médicaments génériques doivent choisir l'une des trois options suivantes lorsqu'ils présentent une demande d'avis de conformité sur la base d'une comparaison avec (ou d'une référence à) un autre médicament commercialisé au Canada :

  • Obtenir le consentement du titulaire de brevet à la délivrance de l'avis de conformité;
  • Attendre l'expiration de tous les brevets inscrits;
  • Présenter un avis d'allégation expliquant pourquoi le médicament générique ne contrevient pas aux brevets inscrits.

Toutefois, l'article 5 ne s'applique que si la demande d'avis de conformité pour le médicament générique est fondée sur un autre médicament commercialisé au Canada. Dans la mesure où l'état dormant constitue une preuve qu'un médicament n'est pas commercialisé au Canada aux fins du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), les fabricants de médicaments génériques pourraient contourner les exigences de ce règlement, c'est à dire qu'ils n'auraient pas à choisir parmi les options énumérées ci-dessus.

Risque pour la protection des données

De même, les protections accordées à un médicament innovant dans les dispositions concernant la protection des données peuvent être perdues si le médicament n'est plus commercialisé au Canada (RAD, art. C.08.004.1(5)). Un médicament dormant peut être considéré comme non commercialisé. La protection des données s'applique en plus de toute protection par brevet accordée à un médicament innovant. Lorsqu'une demande d'autorisation de mise en marché déposée pour un médicament subséquent est basée sur une comparaison avec un médicament innovant, un avis de conformité ne peut être délivré que huit ans après l'autorisation de mise en marché du médicament innovant. Sans protection des données, un état « dormant » pourrait permettre à des médicaments génériques d'entrer sur le marché s'il n'y a plus de brevets en vigueur.

 Risque pour les fabricants de médicaments génériques

L'avis prévient également les fabricants de médicaments génériques qu'un médicament peut être inscrit comme dormant même si les ventes ont repris pour une période pouvant aller jusqu'à six semaines. Cette situation est due au fait que les fabricants doivent informer Santé Canada au plus tard trente jours après la reprise des ventes du produit et, une fois que Santé Canada a été informée, la mise à jour de la base de données peut prendre deux semaines supplémentaires. Par conséquent, les fabricants de médicaments génériques risquent de déposer une PADN à une date donnée en supposant que leur PRC est acceptable aux termes de l'article C.08.001.1b), pour ensuite recevoir une décision négative au motif qu'un PRC au sens de l'article C.08.001.1a) était disponible et aurait dû être utilisé. 

Santé Canada reconnaît que l'approche décrite dans l'avis « ne résoudra probablement pas tous les défis associés à l'élaboration de médicaments génériques ». Elle précise néanmoins que la date de dépôt de la PADN est la date pertinente pour évaluer l'admissibilité du PRC et que tout changement à l'état du PRC qui survient après cette date ne sera pas pris en compte.

Mieux vaut prévenir que dormir

Pour éviter que l'état dormant soit attribué à leurs médicaments, les innovateurs doivent respecter un seuil de ventes minimal au Canada. Sinon, les fabricants de médicaments génériques pourraient avoir recours à des produits de référence étrangers et contourner le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) pour accéder au marché canadien. 

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