Dans le premier d'une série de trois billets, nous examinons les différentes options de tarification des services juridiques qui ont vu le jour au cours de la dernière décennie pour les clients du marché en général et chez Stikeman Elliott. Le deuxième billet de cette série portera sur la façon dont les clients choisissent parmi les différents modèles de prix existants dans différentes circonstances.

Dans la foulée du krach de 2008, les honoraires juridiques ont été scrutés à la loupe partout dans le monde et une nouvelle approche en matière de tarification des services juridiques a vu le jour. Il y a dix ans, l'Association of Corporate Counsel a lancé l'« ACC Value Challenge » (le « défi de l'ACC ») visant à promouvoir l'adoption de conventions d'honoraires alternatives et la facturation fondée sur la valeur des services plutôt que sur les taux horaires. Au cours de cette même période, l'essor des technologies juridiques a permis d'automatiser plus de services, lesquels pouvaient difficilement être facturés à l'heure.

À l'ère de toutes ces innovations et nouvelles possibilités, la tarification a-t-elle vraiment changé en pratique? Oui et non.

Des études de marché démontrent une augmentation de l'utilisation des conventions d'honoraires alternatives, bien qu'elles demeurent tout de même marginales

Dans la documentation sur le défi de l'ACC, le Value Challenge, l'ACC a relevé quatre grandes catégories d'ententes de tarification des honoraires : la tarification à l'heure, les honoraires fixes (ou tarification forfaitaire), les honoraires fondés sur les résultats obtenus et la considération spéciale ou pourcentage de l'opération (piece of the deal). Selon Altman Weil, 64 % des cabinets américains ont recours à une forme de convention d'honoraire alternative pour certains dossiers. Elle estime également que 6 à 10 % des revenus des cabinets découlent d'une forme de convention d'honoraires alternative. CounselLink a publié des chiffres similaires : des conventions d'honoraires alternatives ont été utilisées dans 9,9 % des dossiers et représentaient 7,5 % de la facturation en 2016.

Sur le marché canadien, le sondage mené par le Canadian Lawyer en 2018 sur les conseillers juridiques d'entreprises (Corporate Counsel Survey) a démontré que des conventions d'honoraires alternatives avaient été conclues entre les entreprises et les principaux conseillers juridiques dont elles avaient retenu les services dans seulement 3 % des cas. Une facturation mixte fondée sur les heures facturables et une convention d'honoraires alternative prévalait dans 28 % des cas. Parmi les avocats qui utilisaient des conventions d'honoraires alternatives, près de 45 % estimaient qu'elles étaient plus profitables que des conventions traditionnelles, alors que moins de 5 % étaient d'avis contraire. D'après un plus petit échantillonnage chez Stikeman Elliott, au cours des quatre dernières années, près de 4 % de nos revenus provenaient des conventions d'honoraires alternatives. En outre, nos clients nous demandent de plus en plus souvent d'établir des budgets au début des mandats facturés à l'heure, méthode qui ne se qualifie techniquement pas comme une convention d'honoraire alternative.

Il existe manifestement certains domaines spécialisés où des conventions d'honoraires alternatives se sont imposées pour certains clients, mais la grande majorité des clients sur le marché et des clients de Stikeman Elliott préfèrent la facturation à l'heure pour la plupart des dossiers, et ce, malgré la variété d'options que nous offrons.

Conventions d'honoraires alternatives les plus utilisées chez Stikeman Elliott

Nos clients sont principalement intéressés par les deux premières catégories d'ententes de tarification des honoraires identifiées par l'ACC, soit la tarification à l'heure et les honoraires fixes. Les ententes les plus utilisées chez Stikeman Elliott sont :

  • Conventions d'honoraires alternatives fondées sur le taux horaire :
    • Taux horaire assorti d'un budget par phases
    • Taux horaire assorti d'une approche « à risque contrôlé »
    • Taux horaire assorti d'une prime au résultat et d'une réduction en cas d'échec
  • Conventions d'honoraires fixes :
    • Honoraires fixes pour certaines phases seulement
    • Honoraires fixes pour tout le dossier
    • Honoraires mensuels payés d'avance pour des services précis

Plus récemment, la tarification est devenue plus complexe en raison des possibilités d'automatisation que nous offrons pour bon nombre de nos services juridiques. Les services offerts par Stikeman Elliott sont principalement des services personnalisés fournis par les avocats eux-mêmes. Nous sommes toutefois de plus en plus convaincus que certains aspects des opérations et des services, comme un contrat en particulier ou une question juridique courante, peuvent être automatisés pour le client, ou que certains processus peuvent être grandement simplifiés grâce à la technologie juridique. L'utilisation de la technologie et de l'automatisation nécessite du temps, des efforts et une adaptation au changement de la part de toutes les parties pour assurer leur mise en Suvre réussie. Malgré la prolifération des technologies juridiques « en vente libre », la mise en place d'une technologie et l'adaptation de celle-ci aux besoins d'un client et d'une équipe, ainsi que l'adaptation des programmes aux nuances juridiques dans le cadre de questions plus larges, représentent encore une charge de travail importante. Il n'existe pas d'approche universelle de la tarification, car les clients ont des besoins, des contraintes et des objectifs différents. À ce jour, seulement une petite partie de nos clients ont souhaité intégrer les produits automatisés et la technologie juridique à leur processus juridique, mais ils sont de plus en plus nombreux à le faire. Par conséquent, nous continuons de perfectionner notre façon de faire et nous aimerions connaître vos expériences et vos commentaires à cet égard.

Commentaire des clients — Outil le plus prisé : les budgets par phases et les logiciels de budgétisation

Tout en nous efforçant de tarifer nos services en fonction de leur valeur réelle et en établissant des conventions d'honoraires alternatives faciles à utiliser, nous avons découvert qu'un des outils de maîtrise des coûts les plus prisés et efficaces, tant pour les clients que pour le cabinet et sans égard au type de convention d'honoraires alternative, est la méthode relativement simple du budget par phases. Cet outil peut être personnalisé pour tous les types de dossiers et être utilisé tant pour la tarification à l'heure que forfaitaire. Il peut être établi manuellement à l'aide de modèles sur papier ou automatisé à l'aide de notre logiciel de budgétisation, selon les préférences du client.

Pour établir ce budget, nous divisons le dossier en phases importantes (il y en a généralement entre 7 et 12), puis nous établissons avec le client ce qui doit être réalisé dans chaque phase et assignons à chacune d'elles une fourchette budgétaire. Selon l'ampleur des données que le cabinet et le client peuvent tirer des anciens dossiers, la fourchette de chaque phase peut être déterminée en fonction des étapes détaillées et d'une description précise des coûts ou s'appuyer plutôt sur une estimation globale.

Lorsque le budget de chaque phase est établi, nous sommes en mesure de faire le suivi du temps consacré à chacune des phases et de notre progression par rapport au budget total, puis de transmettre l'information. En plus d'améliorer notre présentation provisoire des coûts au client, le budget permet également au client et au cabinet de recueillir des données plus fiables, qui faciliteront la tarification des futurs dossiers, qu'elle soit à l'heure ou forfaitaire.

Parmi les autres mesures relativement simples qui font écho aux commentaires des clients sur l'amélioration de l'expérience client en matière de tarification, il y a notamment celles-ci : prévenir le client qu'il recevra bientôt une facture, créer un format de facture plus simple et facile à comprendre, et mieux expliquer les débours.

Prochaines étapes

Puisque le monde juridique continue d'évoluer, il est important de demeurer au diapason des besoins de nos clients dans tous les domaines, notamment en ce qui a trait aux options de tarification que nous offrons. À l'instar de l'ACC, nous croyons toujours que la valeur est primordiale et que la tarification de nos honoraires devrait être avantageuse tant pour nos clients que pour le cabinet. Les cabinets d'avocats et les services juridiques ont travaillé fort au cours de la dernière décennie pour assurer une flexibilité, définir ce qu'est la valeur et collaborer afin d'élaborer des conventions d'honoraires qui conviennent à toutes les parties. Dans notre prochain billet, nous formulerons des suggestions pour vous aider à déterminer quelle convention d'honoraires est la plus appropriée selon les circonstances. Nous aborderons également les nouveaux défis que posent la technologie de tarification et les services juridiques automatisés.

Parlez-nous de vos expériences — vos conventions les plus réussies, les éléments que vous trouvez les plus difficiles — afin que nous puissions continuer d'apprendre et de nous améliorer.

Autres ressources

Altman Weil, 2019 Law Firms in Transition: An Altman Weil Flash Survey.

Association of Corporate Counsel, "Value Challenge" (site Web contenant des ressources).

Amy Larson, "Alternative Fee Arrangements : Why and When?", Above the Law, 15 décembre 2017.

Aidan Macnab, "Partnerships Key for In-House Success", Canadian Lawyer (Novembre/Décembre 2018), 36-43.

Kris Satkunas, 2017 CounselLink Enterprise Legal Management Trends Report.

Richard Stock, "The five pillars of performance for the legal department", Canadian Lawyer, 13 mai 2019.

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