En Alberta, les modifications législatives proposées par le projet de loi 26, intitulé Farm Freedom and Safety Act, 2019, offrent aux grands éleveurs de bétail et exploitants agricoles le choix de faire assurer leurs travailleurs par le système public d'indemnisation des accidents du travail ou par une assurance privée. D'autres modifications rendent les normes de travail minimales inapplicables aux salariés qui travaillent dans les élevages et exploitations agricoles de petite taille. Les grands éleveurs de bétail et exploitants agricoles demeureront par ailleurs exonérés de l'application de certaines normes régissant les heures de travail régulières et supplémentaires. Les salariés au service des éleveurs et exploitants agricoles n'auront aucune norme minimale de travail, en particulier le droit de se syndiquer.

Le gouvernement de l'Alberta a proposé des modifications importantes aux normes d'emploi et de travail applicables aux secteurs de l'agriculture et de l'élevage. La campagne électorale victorieuse du Parti conservateur uni comprenait la promesse de retrait des modifications controversées que le gouvernement précédent a apportées aux normes d'emploi et de travail applicables au secteur agricole, résumées dans le projet de loi 6, intitulé Enhanced Protection of Farm Workers Act (le « projet de loi 6 »). Le projet de loi 26, intitulé Farm Freedom and Safety Act, 2019 (le « projet de loi 26 »), devrait recevoir la sanction royale au cours du mois, ce qui entraînera l'abrogation par l'Assemblée législative de l'Alberta de la plupart des aspects controversés du projet de loi 6, notamment la compétence obligatoire du Workers' Compensation Board (commission des accidents du travail) sur le secteur agricole et la suppression de certaines dérogations à la législation sur les normes d'emploi et de travail.

Le 4 décembre 2019, le projet de loi 26 a franchi l'étape de la troisième lecture devant l'Assemblée législative de l'Alberta. Une fois qu'il aura reçu la sanction royale, le projet de loi 26 modifiera l'Agricultural Operation Practices Act (l'« AOPA »), l'Employment Standards Code (l'« ESC ») et le Labour Relations Code (le « LRC »). Le Workers' Compensation Regulation (le « WCR ») devrait également subir des modifications corrélatives. Le projet de loi 26 n'aura pas d'incidence sur les modifications apportées à l'Occupational Health and Safety Act. Les modifications proposées sont résumées ci-après.

Modifications proposées à l'AOPA

Actuellement, les éleveurs et les exploitants agricoles ne sont pas tenus de souscrire une assurance contre les accidents du travail aux termes de l'AOPA. Toutefois, en application de la Workers' Compensation Act (la « WCA ») tous les exploitants agricoles et éleveurs qui emploient des travailleurs rémunérés non membres de leur famille doivent leur procurer la garantie offerte par la WCA et payer les primes applicables. Le projet de loi 26 propose de modifier l'AOPA afin d'obliger les grands exploitants agricoles et éleveurs à veiller à ce que leurs travailleurs bénéficient de l'assurance privée autorisée par le règlement qui n'a pas encore été publié ou d'une assurance publique en application de la WCA. Les exploitants agricoles et éleveurs qui emploient cinq employés ou moins (à l'exclusion des membres de leur famille et des employés dont ils ont retenu les services pour moins de six mois consécutifs) sont dispensés de l'obligation d'assurance prévue par l'AOPA.

Même si le projet de loi 26 n'a pas d'incidence sur la WCA ou le WCR, le gouvernement devrait apporter certaines modifications nécessaires au WCR afin de dispenser les petits exploitants agricoles et éleveurs de l'obligation actuelle imposée par la WCA de maintenir une couverture visant les employés rémunérés non-membres de leur famille. En réalité, le ministre de l'Agriculture a précisé que les petits exploitants agricoles vont être dispensés de l'obligation de fournir une assurance contre les accidents du travail.

Les modifications de l'AOPA devraient entrer en vigueur le 31 janvier 2020.

Modifications proposées à l'ESC

Actuellement, en application de l'ESC, les normes du travail minimales s'appliquent aux employés rémunérés d'une exploitation agricole ou d'un élevage qui ne sont pas membres de la famille de l'exploitant ou de l'éleveur. Cependant, les employés d'une exploitation agricole ou d'un élevage sont exonérés de l'application de certaines normes régissant les heures de travail régulières et supplémentaires. Un employé est considéré par l'ESC comme l'employé d'une « exploitation agricole ou d'un élevage » si son emploi est, selon le cas, directement lié [traduction] :

  1. à la production primaire d'Sufs, de lait, de céréales, de semences, de fruits, de légumes, de miel, de bétail, d'animaux d'élevage diversifiés, de volaille ou d'abeilles (les « produits agricoles»),
  2. à toute autre activité agricole primaire prescrite par règlement.

Le projet de loi 26 propose d'exonérer les employés de l'exploitation agricole ou de l'élevage qui compte cinq employés ou moins (à l'exclusion des membres de la famille de l'employeur ou des employés dont l'employeur a retenu les services pour moins de six mois consécutifs) de toute application de l'ESC. En outre, le projet de loi 26 propose l'ajout des champignons, du gazon, des arbres, des arbustes et des plantes à la liste des produits agricoles et l'exonération des employés dont l'emploi est directement lié à la production primaire de produits agricoles dans une serre ou une pépinière. D'autres exonérations pourraient être ajoutées par règlement.

Ces modifications devraient entrer en vigueur le 31janvier 2020.

Modifications proposées au LRC

Le projet de loi 6 du NPD avait étendu la portée du LRC aux employés rémunérés d'une exploitation agricole ou d'un élevage non membres de la famille de l'exploitant ou de l'éleveur. Dans le projet de loi 26, il est de nouveau proposé de faire exclure par le LRC tous les employés d'une exploitation agricole ou d'un élevage de l'application des normes du travail, y compris le droit de négocier collectivement et de se syndiquer. Les employés d'une exploitation agricole ou d'un élevage sont ceux dont l'emploi est directement lié aux activités agricoles ou d'élevage suivantes [traduction] :

  1. la production primaire d'Sufs, de lait, de céréales, de semences, de fruits, de légumes, de miel, de bétail, d'animaux d'élevage diversifiés, de volaille ou d'abeilles;
  2. la production de poisson d'élevage au sens de la Fisheries (Alberta) Act;
  3. toute autre activité agricole primaire prescrite par règlement.

Les activités agricoles ou d'élevage excluent expressément les serres, les champignonnières, les pépinières et les gazonnières.

En supposant que le projet de loi 26 reçoive la sanction royale, ces changements seront rétroactifs au 20 novembre 2019.

Principales conclusions pour les employeurs

Le projet de loi 26 a franchi l'étape de la troisième lecture et devrait recevoir la sanction royale au cours du mois. Par conséquent, les grands exploitants agricoles et éleveurs auront le choix d'assurer leurs employés en application du régime existant de la WCA ou au moyen d'un régime privé, tandis que les plus petits employeurs ne seront vraisemblablement plus tenus de souscrire d'assurance privée ou publique (même s'ils pourraient s'attirer des réclamations privées coûteuses à leur propre risque). Les petits exploitants agricoles et éleveurs peuvent s'attendre à être relevés de toutes leurs obligations liées aux normes du travail en application de l'ESC, tandis que les grands employeurs demeureront seulement exonérés de l'application de certaines normes régissant les heures de travail régulières et supplémentaires.

Le fait que les exploitants agricoles et éleveurs n'auront plus d'obligations légales à remplir aux termes du LRC ne réconfortera pas pour autant les employeurs dont les employés se sont syndiqués après l'entrée en vigueur du projet de loi 6. En outre, les modifications du droit du travail annoncées par le projet de loi 26 pourraient être de courte durée et faire l'objet d'une contestation constitutionnelle au motif que l'exclusion, par le LRC, des employés du secteur de l'agriculture et de l'élevage constitue une atteinte importante à leur liberté d'association garantie par la Charte. En 2001, la Cour suprême du Canada a conclu que l'abrogation d'une législation similaire par l'Ontario contrevenait de manière injustifiable à ce droit garanti par la Charte et a déclaré la législation inconstitutionnelle dans la mesure de l'incompatibilité avec la Charte. L'Ontario a dû faire marche arrière et modifier sa législation pour se conformer à l'arrêt de la Cour suprême. Le PCU devrait envisager de couper court à toute contestation constitutionnelle en modifiant le LRC afin de déroger expressément à l'application du droit d'association accordé par la Charte, et ce, au moyen de la clause dérogatoire prévue par l'article 33 de la Charte.

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